Violence contre les femmes : les signes avant-coureurs

Le Ministère de l'intérieur a donné des chiffres sur les violences conjugales, elles ont augmenté de 10% en 2020, les homicides sont en légère baisse avec 102 les femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.

Violences conjugales : on en parle de plus en plus

Alexia Delbreil est psychiatre et médecin légiste au CHU de Poitiers . Elle a soutenu, en 2011, une thèse intitulée « Homicide conjugal : profil de l’auteur et facteurs prédictifs de passage à l’acte. » à partir d'affaires d’homicide conjugal jugées entre 1999 et 2010 par les cours d’assises de la Vienne, des Deux-Sèvres, de la Charente-Maritime et de la Vendée.
A l'époque, il n'y avait pas d'études sur ce sujet. Depuis quelques années, le crime passionnel n'est plus qualifié de cette façon. Quand ce crime concerne les femmes, on parle de féminicide. Cela a donné une visibilité à ces homicides.
Il y a de la violence et des passages à l'acte de part et d'autre, mais les chiffres des féminicides sont beaucoup plus importants.

Les signes avant-coureurs

La violence conjugale peut toucher tous les milieux sociaux. Il y a deux types de facteurs : les facteurs déclenchants (qui peuvent apparaitre des mois avant le passage à l'acte) et les facteurs précipitants (qui interviennent à quelques minutes ou quelques secondes du passage à l'acte). Parmi les facteurs déclenchants : un mal être de l'un ou de l'autre ou des deux, une prise de distance dans le couple, les femmes qui reprennent un travail, les enfants qui grandissent, une vie sociale en dehors du couple qui peut entraîner de la jalousie, des conflits liés à l'argent. Ces éléments peuvent pousser à la violence conjugale.
Près de la moitié des féminicides n’ont jamais été précédés de violences physiques au sein du couple. Ce qui veut dire qu'il est parfois difficile de détecter les signes d'un passage à l'acte.
Il faut être très attentif aux menaces suicidaires, elles peuvent basculer en passage à l'acte homicide.

Le moment de la rupture

Dans 70% des situations étudiées par Alexia Delbreil, le passage à l'acte est lié à la rupture, au moment de l'officialisation de la rupture (démarches, prise de rendez-vous avec un avocat) ou dans les six mois après cette rupture.
Les profils de ces hommes qui passent à l'acte mettent en évidence l'impossibilité d'accepter la séparation. La vie sans l'autre, c'est un gouffre qui s'ouvre, cela renvoie à une faille narcissique, un manque de confiance en soi. La femme est une béquille dans la relation, même si celle-ci est insatisfaisante. Pour les femmes qui passent à l'acte, le moment de la rupture n'est pas aussi déterminant.
Le passage à l'acte est parfois prémédité, mais dans la plupart des cas, il est impulsif. Ce qui explique l'usage d'armes d'opportunité : armes blanches, armes à feu, strangulation.

La prévention

Les femmes font plus facilement que les hommes appel à de l'aide extérieure en cas de mal-être. L'entourage (parents, amis, collègues) doit être attentifs aux petits changements de comportement qui peuvent être un signe de mal-être.
Les forces de l'ordre sont beaucoup mieux formées pour accueillir la parole des femmes, pour qu'elles puissent porter plainte plus facilement.
Les enfants sont des victimes directes des violences conjugales et des homicides. La députée Marie Tamarelle-Verhaeghe a fait une proposition de loi à l’Assemblée nationale pour reconnaître le statut de victime aux enfants témoins de violences conjugales.

Le 3919 : numéro d'urgence pour les femmes victimes de violences accessible 24h/24 et 7 jours sur 7 (gratuit et anonyme).
Le site internet Arrêtons les Violences rassemble toutes les infos pratiques et propose des kits de formation.
Alexia Delbreil participe vendredi 26 novembre 2021 à 20h, au Théâtre de Thouars à une soirée-débat organisée par le réseau Stop violences 79, autour du documentaire "Féminicides : mécanique d'un crime annoncé " réalisé par des journalistes du Monde (entrée gratuite). Autres invités : Gwenola Joly-Coz (Première Présidente de la Cour  d’Appel de Poitiers), Lydia Flem (clip photos), Lilamu (slameuse) et Ludovic Gaussot (sociologue).