Mort d'Uderzo : quand Orléans créait le premier parc Astérix...
Astérix a perdu aujourd'hui son papa, le dessinateur Albert Uderzo. A Orléans, on se souvient avoir accueilli le tout premier parc Astérix : une installation éphémère, en 1967, dans le cadre des Floralies, mais qui a durablement marqué des générations d'Orléanais.
Astérix et Orléans, c'est une vieille histoire. Le décès d'Albert Uderzo, à 92 ans, annoncé ce mardi 24 mars, nous invite à la redécouvrir. Certes, aucune aventure du célèbre Gaulois ne se déroule à Cenabum (nom d'Orléans à l'époque gallo-romaine) ; et lors de son Tour de Gaule, en 1965, "le petit guerrier à l'esprit malin" ne daigne pas traverser l'actuelle région Centre Val-de-Loire :
Mais en 1967, c'est bien à Orléans qu'Astérix emménage pour un bail de 6 mois. Cette année-là, d'avril à octobre, le tout nouveau Parc Floral de la Source accueille une manifestation d'envergure : les Floralies, une grande exposition internationale de fleurs, avec 320 exposants venus d'une quinzaine de pays. Mais pour attirer davantage de public, et notamment les familles, l'idée germe d'aménager aussi un espace dédié à l'univers d'Astérix, et baptisé alors "Floralix".
Floralix, nouvelle résidence d'Astérix
Pourquoi Astérix ? Tout simplement parce que la bande dessinée est déjà devenue un véritable phénomène. 9 albums sont alors parus, et l'année précédente, en 1966, Astérix et les Normands est le premier titre à franchir en seulement deux jours la barre du million d'exemplaires vendu !
C'est alors un véritable village inspiré des personnages d'Uderzo et de Goscinny qui est créé sur 3 hectares : des huttes en chaume, des campements et temples romains, des grandes statues à l'effigie d'Astérix et d'Obélix, une rôtisserie "Au rieur sanglier", une taverne "Chez Cléopâtre", et des animations avec des concours et des comédiens déguisés en Astérix et autre Panoramix.
"Tout cela était très novateur pour l'époque, souligne l'historienne orléanaise Anne-Marie Royer-Pantin, et c'est aussi une époque où Orléans était toujours un peu en avance. L'idée des Floralies internationales, c'était une première, et c'était aussi le premier parc à thème de France. Et on avait fait les choses en grand, avec une reproduction du village à l'identique de la bande dessinée."
Stéphane Sainson s'en souvient bien : son père fut alors commissaire à la publicité aux Floralies. "J'avais huit ans, et ce parc me paraissait énorme, raconte-t-il. Il y avait des activités pratiquement tous les jours. Goscinny et Uderzo étaient complètement impliqués dans cette histoire, ils avaient validé le projet, et je crois qu'ils étaient venus sur place une ou deux fois. Il y a même eu un album réédité pour l'occasion, avec une page de garde spécifique à Floralix, l'album de la Serpe d'Or, et cette édition-là est aujourd'hui très recherchée." Témoignage à écouter ici :
"C'était un vrai village gaulois" se souvient Stéphane Sainson
2,3 millions de visiteurs
Les films d'époque récupérés et mis en ligne par Ciclic en donnent un bon aperçu. Le succès populaire est au rendez-vous, avec 2,3 millions de visiteurs. Les retombées médiatiques sont considérables, et contribueront à installer la notoriété du Parc Floral : Paris-Match consacre un numéro spécial à l'événement, le jeu télévisé Intervilles y est organisé en août, France Inter installe même une antenne provisoire, au doux nom de Radio-Floralix.
Mais le bilan financier est négatif, l'entretien des structures aménagées semble trop coûteux : ce premier parc Astérix de France ferme définitivement ses portes en octobre 1967, à l'issue des Floralies. "On n'a rien gardé, observe Anne-Marie Royer-Pantin, parce que les finances n'étaient pas en très très bonne état. De ce grand parc à thème inspiré par Astérix, il ne reste plus rien aujourd'hui, sauf beaucoup d'images. C'est très émouvant, parce que c'est une époque très enthousiaste, pleine d'espoirs, et toutes ces fleurs sont devenues l'image de marque de la ville d'Orléans." Interview disponible ci-dessous :
"C'est émouvant, parce que c'est toute une époque" - Anne-Marie Royer-Pantin