Une voix s’éteint, la grande soprano toulousaine Mady Mesplé est morte à 89 ans
À l'aise dans tous les répertoires, de l’opérette à l’opéra, la soprano toulousaine Mady Mesplé s'est éteinte samedi 30 mai 2020 à l'âge de 89 ans dans sa ville natale de Toulouse.
"Je suis toujours une femme lente et toujours en retard" confiait-elle au micro d'Antoine Livio en 1995 sur France Musique, dans une modestie caractéristique de l'ensemble de sa carrière. Mady Mesplé, immense soprano des décennies 1950 à 1970 à la voix cristalline, s'est éteinte samedi 30 mai 2020 à l'âge de 89 ans, dans la ville de Toulouse où elle vit le jour.
Ariane à Naxos, Lakmé, Rigoletto, mais aussi les moins classiques Dialogues des Carmelites, Die Jakobsleiter, ou les Quatre poèmes de Sappho... Pendant près de trois décennies, Mady Mesplé a chanté les plus grands rôles sur les plus belles scènes, sans jamais se détourner des défis de la scène contemporaine.
Une voix née au théâtre du Capitole
Née à Toulouse le 7 mars 1931 dans une famille de mélomanes, elle débute le solfège à 4 ans et entre à 7 ans au conservatoire. Elle se tourne dans un premier temps vers le piano, dans lequel elle excelle, avant de rejoindre à Toulouse la classe de Madame Izar-Lasson épouse du directeur du théâtre du Capitole de Toulouse. Le couple lui ouvre les portes de Liège et de la Belgique. Elle y chante Lakmé, Le Barbier de Séville, et chemine vers la Monnaie de Bruxelles, puis vers l'Opéra de Lyon où elle brille dans Les Contes d'Hoffmann d’Offenbach, opéra qu'elle chantera également à Paris en décembre 1975 dans une mise en scène de Patrice Chéreau.
Elle avait une voix très cristalline avec des aigus et des sur aigus... c'était phénoménal" - se souvient le directeur artistique du Théâtre du Capitole, Christophe Ghristi
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Elle excelle dans tous les répertoires
Chéreau, Jolas, Boulez... Le nom de Mady Mesplé reste également irrémédiablement lié à la modernité et à aux créations de ses contemporains. Une musique qu'elle ne jugeait pas plus difficile, mais nécessitant beaucoup de travail : "Au départ il faut être très musicien, avoir beaucoup d'oreille... J'ai beaucoup travaillé, je crois que j'entends bien, j'ai fait assez d'assez d'harmonie... Mon Dieu, j'ai souvent été perdue, ne sachant plus ce que je chantais ! "
Cette appétence pour la modernité n'a jamais faibli chez la soprano. Lorsqu'elle quitte les scènes internationales à la fin des années 1980, elle transmet dans son enseignement le même intérêt pour le répertoire contemporain. Une fierté pour elle, qui soulignait, il y a quelques années, qu'elle a "chanté plus de musique contemporaine que d'opérettes !" disait-elle dans cet entretien au site ForumOpéra.com.
Mady Mesplé avait conquis le grand public, ses nombreux passages à la télévision chez Jacques Martin ou Pascal Sevran notamment, avaient contribué à sa popularité. Elle est l'une des cantatrice française qui a le plus enregistré , de l'opéra, de l'opérette , mais aussi la musique sacrée et la musique contemporaine.
Une voix vaincue par la maladie de Parkinson
Mady Mesplé avait raconté dans son livre La Voix du corps (Michel Lafon) son combat contre la maladie de Parkinson, diagnostiquée en 1996. Elle était devenue marraine de l’association France Parkinson.
"En 2001, je fais mes adieux à la scène. J’ai 70 ans et ils se déroulent dans la joie, alors que je les avais tant redoutés. Mais j’ai mal aux jambes, je perds l’équilibre. Aujourd’hui, je sens la maladie évoluer, je bouge de plus en plus mal et j’en souffre. […] J’ai peur de me retrouver seule. Peur de tomber. Lors de mes accès de fatigue, je broie du noir, je n’ai envie de rien, je reste au lit. Chanter face au public m’aidait à oublier que j’étais malade car son enthousiasme me galvanisait. Maintenant, je n’ai même pas envie de chanter pour moi. Ma voix s’est tue."
Mady Mesplé est morte chez elle, entourée de sa famille, dans son appartement du centre de Toulouse, à 200 mètres du Capitole.