Coronavirus : 1300 repas cuisinés au Garage moderne à Bordeaux pour des migrants et étudiants
Trois fois par semaine depuis le début du confinement, une dizaine de bénévoles cuisine 170 repas dans la cantine du Garage moderne, à l'initiative des associations Ernest et Refugee Food Festival. Ces repas sont ensuite distribués à des migrants ainsi que des étudiants isolés.
Dans l’immense hangar du Garage moderne, trois tables sont venues agrandir la cuisine où le chef Barnabé officie seul d'habitude. Ce vendredi 8 mai, une dizaine de personnes s'affaire. "J'ai le rôle crucial : j'épluche les asperges" plaisante Capucine qui fait du bénévolat pour la première fois. "Je n'avais pas le temps avec mon activité professionnelle et là, comme beaucoup, je suis au chômage technique donc c'est l'occasion de mettre à profit ce temps pour aider les autres... et pour rencontrer du monde" explique-t-elle. "Complètement !" ajoute son voisin de table. Tous les deux parlent derrière leur masque, qui est obligatoire pour tous les bénévoles.
Cette idée est venue au début du confinement. Sandrine Clément, organisatrice du Refugee Food Festival et Reda El Anmati de l'association Ernest (un programme de restauration solidaire) cherchaient un moyen de fournir un repas aux personnes dans le besoin. "_Cela me semblait évident lorsque je voyais que l'_on disait tous chez soi alors que certains restaient dehors comme les migrants... et aussi les étudiants en galère après la fermeture des restaurants universitaires du CROUS" avance Reda El Anmati, "on s'est tout de suite tourné vers le Garage moderne qui fait beaucoup d'actions solidaires."
La Cantine, le restaurant associatif du Garage moderne, étant fermée depuis le début du confinement, son chef, Barnabé, a de suite sauté sur l'idée. Le collectif s'est organisé. Les denrées sont récupérées auprès des restos du cœur et de la banque alimentaire et cuisinées trois fois par semaine, le lundi, le mercredi et le vendredi. Un plat et un dessert. Les paniers sont ensuite livrés en partie par les Coursiers bordelais (une entreprise locale de livraison à vélo dont le local se trouve... dans le Garage moderne) dans les CADA (centres d’accueil de demandeurs d’asile), le reste est partagé entre une association qui s'occupe des camps de migrants à Bordeaux lac et une association étudiante qui s'est montée pendant le confinement pour venir en aide aux étudiants isolés dans le besoin.
ECOUTEZ - les coulisses des préparations de repas solidaires au Garage moderne
Des chefs prêtent main forte
A chaque session, un chef apporte son concours pour élaborer les repas et diriger l'équipe de bénévoles. Ce vendredi, c'est Christophe Magry, chef du restaurant bordelais Monzù qui officie. Il s'est spontanément rapproché de l'association Ernest pour proposer son aide. "Par rapport à mes fournisseurs, je savais qu'il y avait des marchandises qui allaient être jetées et qui n'allaient pas être transformées..." explique-t-il en poursuivant : "Au restaurant, on a une équipe de 30 personnes et je me suis dit qu'il y avait peut-être la possibilité de se rendre utile en apportant notre savoir-faire." Le chef participe maintenant régulièrement aux sessions cuisine, accompagné de différents membres de son équipe. "On a des serveuses qui ont aidé en cuisine. C'est aussi un moyen de garder contact avec l'équipe" assure Christophe Magry.
Et au fait, le menu de cette session ? En plat, une salade de penne rigate avec une crème d'avocat au thon et des crudités, et en dessert une crème à la pistache avec des pêches et un crumble de fruits secs. "Cela apporte forcément du réconfort" sourit le chef du Monzù. Son confrère, le chef Barnabé qui officie habituellement seul à la cantine reconnaît que gérer une équipe de bénévoles n'est pas de tout repos. "Il y a l'enjeu sécuritaire car on manie par exemple des couteaux mais aussi et surtout sanitaires" insiste-t-il. Les tables et ustensiles sont ainsi désinfectés avant, pendant et après chaque session. "Mais il y a aussi le plaisir de partager autour de la cuisine, de leur apporter des techniques" sourit-il.
Le collectif espère continuer après le déconfinement
La fin du confinement ne sonnera peut-être pas la fin de cette action. Le collectif est en train de discuter avec ses partenaires pour rassembler les financements et continuer la livraison de ces repas après le déconfinement. Le chef Barnabé coordonne ce projet dont il voit l'utilité demain encore : "Il va y avoir une reprise mais les restaurants et les petits boulots ne vont pas reprendre tout de suite, les familles vont toujours être dans ce besoin là. La crise ne va pas s'arrêter au 11 mai" expose-t-il. Depuis le 11 avril, les bénévoles ont distribué 1 250 repas sur Bordeaux.