Le casse tête des petits commerçants face à la règle des huit mètres carrés par client
Samedi matin, beaucoup de commerçants vont enfin (re)lever le rideau de fer. Mais en respectant la nouvelle consigne sanitaire : un client maximum pour huit mètres carrés. Pas simple pour les petites boutiques !
Calculer la superficie puis la diviser par huit. Tous les commerçants ont procédé à cette opération mathématique, indispensable pour déterminer le nombre de clients qu’ils pourront accueillir à partir de samedi matin. Une règle qui va avoir un impact considérable sur leur chiffre d'affaires dans la cruciale période des achats de Noël.
L’une des plus petites boutiques du centre-ville de Caen s’intitule ‘Au risque de vous plaire’. “Ici notre surface est de 16 mètres carrés. Donc seulement deux clients”. Pour Anne Recq le calcul a été rapide. Et, surtout, le résultat bien éloigné de la fréquentation habituelle de son magasin de bijoux. “Sur la période de Noël on arrive à une vingtaine de clients en même temps, donc vous imaginez à quel point cette mesure est contraignante" explique la commerçante. “Lors du premier déconfinement nous avions droit à trois clients en simultané. Et c'était déjà difficile de demander à certains de sortir de la boutique". Anne Recq s’attend donc à travailler dans des conditions qui ne lui plaisent pas. “On est dans le bijou. Il y a un temps de regard et de réflexion. Mais là, ça va donner des conditions de vente stressantes. Pour nous comme pour le client” se désole la commerçante qui réalise, habituellement 50% de son chiffre d'affaires annuel sur la période novembre-décembre.
Imagination pour réduire l’affluence
En mai, lors du déconfinement, la précédente norme était de quatre mètres carrés par personne en incluant les salariés de la boutique. Le (re)déconfinement est différent puisque le calcul n’inclut désormais que la clientèle. Une modification qui va aider Laurent Layet, le directeur de la librairie 'Brouillon de culture', qui compte jusqu'à douze salariés présents en simultané. “Nous avons 320 mètres carrés, donc désormais une possibilité de quarante clients avec cette règle qui ne compte pas le personnel”. Il estime qu’il n’atteindra pas le seuil maximal, y compris les jours de fortes affluences. De toute façon qu’il a réfléchi à plusieurs façons de réduire la fréquentation des rayons sans affecter le chiffre d’affaires. “Nous allons externaliser le paquet cadeau” explique-t-il en montrant le large périmètre vide devant son magasin. “J’ai demandé à la Mairie l’autorisation d’installer un barnum sur le trottoir pour les emballages cadeaux. Cela réduira la file d'attente dans le magasin” détaille le libraire. Il compte aussi poursuivre la vente en Drive et par correspondance, toujours dans le souci de réduire le nombre de visiteurs dans les trois niveaux de son magasin.
Gérer la file d’attente
Autre idée, trouvée par Stéphanie Heudier, gérante de l’enseigne ‘Paul Marius’, spécialisée dans les sacs à main : aller au devant des clients obligés d’attendre devant sa petite boutique de trente mètres carrés. “J’ai prévu une personne qui sera en extérieur. Pas pour faire de la vente de trottoir mais pour parler avec les clients. Par exemple leur expliquer l’historique de notre marque” détaille la commerçante, qui espère ainsi combler les délais d'attente avant d’entrer dans son magasin. Pas simple pour un magasin qui accueille en général jusqu’à quinze à vingt clients dans les périodes de forte affluence. “On ne fera probablement pas notre chiffre habituel de décembre malgré les deux heures supplémentaires d'ouverture quotidienne et les dimanches. Mais pour l’instant ce n’est pas l’heure de faire les bilans” juge la patronne de ce magasin situé dans le centre ville.
Globalement tous les commerçants apprécient ce feu vert donné pour rouvrir dès ce 28 novembre. Mais ils s’attendent à vivre une période difficile, entre contraintes sanitaires, réalités économiques et impatience de certains clients.