Toulouse : le combat de Janick, diplômée du Capes mais sourde, pour avoir le droit d'enseigner
Diplômée du Capes de lettres modernes à l'été 2015, affectée à la rentrée 2016 sur un poste de professeur de français au lycée de Saint-Gaudens, en Haute-Garonne, Janick Leclair, 38 ans reste privée des salles de classes par l'Education nationale. En cause, sa surdité.
L'enseignement, Janick Leclair en a pourtant toujours rêvé. Ce désir de transmettre, explique-t-elle, lui vient de sa passion pour la littérature. "Enfant, je vivais dans un univers de livres pour me libérer de cet ennui que l'on peut ressentir quand on est enfermé dans ce monde de sourd. Avec les livres, on peut comprendre le monde, trouver des réponses à nos questions. Très vite, mon souhait a été de transmettre cette passion aux autres, et aux élèves, à travers l'enseignement" .
Déclarée "inapte" pour "état de santé incompatible à la fonction d'enseignant"
Sourde depuis l'âge de cinq ans des suites d'une méningite, son handicap ne l'a pas empêchée d'obtenir son Capes de lettres modernes à l'été 2015. Lors de la dernière rentrée scolaire, en septembre 2016, elle décroche un poste de professeur de français au lycée Bagatelle de Saint-Gaudens. Mais la veille de la rentrée, Janick reçoit un coup de fil du médecin de prévention du rectorat, qui, après avoir examiné courant juillet une requête de la trentenaire visant à bénéficier de l'aide d'un assistant pour préparer ses cours, la déclare finalement inapte pour état de santé incompatible à la fonction d'enseignant.
Le comité médical départemental doit trancher
Pour Janick, c'est l'incompréhension. "J'ai eu la sensation que le médecin me prenait de haut, qu'il ne m'écoutait pas réellement, qu'il avait déjà son avis bien tranché sur la question du handicap." Mais elle ne va pas baisser les bras pour autant. Déterminée, elle sollicite de nombreuses associations, et va même jusqu'à obtenir le soutien du délégué interministériel au handicap, qui intervient auprès du rectorat de Toulouse pour faire bouger les lignes. Avec succès : afin de pouvoir enseigner, Janick doit désormais obtenir l'aval du comité médical départemental, sous autorité du rectorat. Ce dernier ne se prononcera après l'avis de deux experts.
Pas de cadre juridique pour les professeurs sourds
Mais pour Janick, l'absence de loi concernant la situation des professeurs sourds semble être le coeur du problème. A titre de comparaison, concernant les professeurs non-voyants, leur handicap existe, en tant que tel, juridiquement. "Alors que dans le cas des professeurs comme moi, rien ne dit qu'il y a un seuil de surdité à partir duquel on ne peut pas faire classe", tempête Janick, qui ne connaîtra l'avis des experts et du comité départemental médical qu'au début du mois de mars.