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Engrillagement de la Sologne : la colère des habitants monte d'un cran
En Sologne, des kilomètres de grillages s'étendent le long des domaines de chasse privés acquis par des grandes fortunes françaises. Une pratique qui exaspère de nombreux Solognots et dont les premières victimes sont les animaux.

Dans le Loir-et-Cher, entre Lamotte-Beuvron et Chaumont-sur-Tharonne, les routes sont bordées de clôtures. Un paysage grillagé qui n'est pas rare en Sologne. "C'est vraiment infernal, ils continuent de clôturer à côté de chez moi." En bordure de route, une Solognotte s'arrête en voyant Raymond et Marie Louis, co-fondateurs de l'association Les amis des chemins de Sologne.
"J'ai déjà été couper des grillages il y a quelques jours, mais là je ne peux pas, ce sont mes voisins." Ils sont de plus en plus d'habitants à vouloir abattre eux-mêmes les grillages qui s'érigent un peu partout le long des propriétés en Sologne.
Si rien n'est fait, la situation va exploser
"On dit aux riverains de ne toucher à rien. Mais je pense que si rien ne se passe d'ici la fin de l'année, la situation va exploser", affirme Raymond Louis, président de l'association Les amis des chemins de Sologne, qui lutte depuis 22 ans contre l'engrillagement.
Cette pratique, apparue il y a déjà une trentaine d'années, est un véritable fléau pour les Solognots riverains, les promeneurs et les amoureux de la nature. Des centaines d'hectares de terre sont clôturés par des grillages de deux mètres de haut, enterrés dans le sol et parfois surmontés de barbelés.
Parmi ces propriétaires de domaines, Franck Provost a vu son nom être rendu public pendant le confinement. Contacté par France Bleu Orléans, il affirme ne pas comprendre pourquoi son nom est associé à la polémique. "Mon terrain n'est pas totalement clôturé, il y a simplement des grillages en bordure des routes principales", assure le célèbre coiffeur. "Mes clôtures respectent la législation et ne dépassent pas 1 mètre 20 de haut."
Depuis janvier 2020, le SRADDET, un document d'aménagement régional, impose des critères stricts pour la pose de clôtures. Elles doivent êtres composées de trois fils, être d'une hauteur maximale de 1 mètre 20 et avec un espace de 40 centimètres à la base. Le SRADDET, attaqué par plusieurs propriétaires, n'est cependant pas effectif puisqu'il n'est pas encore inclus dans un Plan local d'urbanisme. Ses directives font pour le moment office de recommandations.
Le but, pour certains propriétaires est de délimiter les bordures de leurs domaines de chasse. Un argument que fait valoir Benjamin Tranchant, propriétaire d'un domaine en Sologne. "Certains propriétaires ont envie de vivre paisiblement chez eux, mais malheureusement, personne ne respecte le droit de propriété", estime le président du groupe de casinos Tranchant. "Sur mes territoires encore ouverts, on vit toutes les semaines des intrusions permanentes."
Mais pour Raymond Louis, les premières victimes de ces clôtures sont les animaux qui, en tentant de traverser, se blessent souvent mortellement.
Des pratiques de chasse critiquées
Pour Raymond Louis, président de l'association, ces grillages servent avant tout à emprisonner les animaux à l'intérieur des domaines. "Ils font en sorte que le gibier soit leur gibier et qu'il ne puisse pas s'échapper", s'indigne le Solognot.
Dans ces enclos de centaines d'hectares, certains propriétaires s'adonneraient ensuite à de grandes parties de chasse. "On ne peut pas appeler ça de la chasse, c'est de l'abattage", nuance Raymond Louis, lui-même chasseur. A l'intérieur des enclos, la population animale est très dense puisque ni les cervidés, ni les sangliers, ni la petite faune ne peut passe au travers des grillages, qui comportent souvent trois épaisseurs. "C'est indéfendable ce qui se passe, parce que sur ces territoires, ils peuvent tuer en une journée jusqu'à 300 sangliers", se désole Raymond Louis. Un tableau de chasse qui ne serait pas consommé, assure le président de l'association. "Ils creusent des fosses et y jettent les animaux."
Une fois que les animaux viennent à manquer dans le domaine, certains propriétaires en importeraient. "La plupart du temps, il font venir des animaux des pays de l'Est", explique Raymond Louis. "Le problème, c'est que dans les pays de l'Est, il y a la peste porcine Africaine." Une maladie qui, pour le moment, n'a pas été amenée jusqu'en Sologne mais pour laquelle il n'existe pas de traitement.
De nombreux élus locaux s'emparent désormais du sujet. Le député LREM du Cher, François Cormier Bouligeon, notamment, a élaboré un projet de loi contre la chasse dans les enclos et semi-enclos.
Un projet soutenu par l'association Les amis des chemins de Sologne. "De cette manière, si ces propriétaires veulent chasser, ils devront faire tomber les barrières", résume Raymond Louis.
La travail des pompiers impacté
Les kilomètres de grillages ne bloquent pas que les animaux, souligne Raymond Louis. Lors de feux de forêts, les pompiers voient parfois leur intervention freinée par la présence de ces clôtures hautes. A la mi-septembre, un incendie s'est déclaré dans des sapinières privées .
L'accès étant difficile, les pompiers ont dû mobiliser des avions bombardiers d'eau pour la première fois dans la région. "Les pompiers ne peuvent pas passer, et les animaux se retrouvent aussi bloqués dans les flammes", souligne Raymond Louis en notant que cet été, plusieurs feux ont décimé une partie de la faune bloquée dans les enclos.
Les promeneurs mécontents
Un autre point de crispation lié à l'engrillagement, c'est la pose de clôtures sur les chemins ruraux ou communaux qui traversent ces domaines privés. Promeneurs, cyclistes et cavaliers doivent parfois franchir un portail bordé d'une clôture. Cette pratique est critiquée, puisque ces chemins n'appartiennent pas aux propriétaires des domaines.
La défense des chemins ruraux était d'ailleurs la première lutte de l'association Les amis des chemins de Sologne. L'organisation qui regroupe désormais près de 700 adhérents continue de protester contre l'obstruction de ces axes publics, notamment au travers de manifestations.
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