Procès de l'attentat du Bardo : la frustration des victimes loirétaines après le verdict
4 ans après l'attentat du musée du Bardo, la justice tunisienne a prononcé 15 condamnations. Le procès a apporté trop peu de réponses estiment l'avocat Philippe de Veulle, qui défend des victimes du Loiret, et Dominique Cazin, une habitante de St Denis-en-Val, blessée lors de l'assaut.

Un mélange de frustration et de colère : c'est le sentiment qu'éprouvent les victimes et leur famille au lendemain du verdict dans le procès de l'attentat du musée du Bardo à Tunis. Cet attentat islamiste avait tué 21 touristes et un policier, le 18 mars 2015. Parmi les personnes décédées : une Loirétaine, Huguette Dupeu, 74 ans, qui habitait Ascoux, et qui passait des vacances en Tunisie avec sa sœur, sa fille et une amie de celle-ci, qui toutes les 3 avaient été blessées ce jour-là... Les 2 assaillants, eux, avaient été abattus par la police.
Ce n'est pas ma conception de la justice"
Samedi soir, le tribunal de première instance de Tunis a condamné 15 accusés, dont 3 à la perpétuité ; 10 accusés en revanche ont été acquittés. Mais ce procès (une dizaine d'audiences en dix-huit mois) est loin d'avoir apporté toutes les réponses sur les responsabilités... Lors de la procédure, 6 suspects ont été relâchés après s'être plaints de torture de la part de la police tunisienne, et le principal organisateur présumé de l'attentat (Chameseddine Sandi) aurait été tué lors d'un raid américain en Libye en février 2016, à moins qu'il ne soit en fuite. D'où un sentiment d'inachevé pour Maître Philippe de Veulle, il est l'avocat de la famille d'Huguette Dupeu : "Depuis le début, je dénonce ce procès ! Il y a eu une coopération bâclée avec la France, on n'a reçu qu'un tiers des éléments du dossier, il y a eu toutes les défaillances de l'enquête, le manque d'écoute des victimes... Ce verdict ne nous convient pas du tout, c'est une parodie de justice. Pour les victimes, c'est quelque chose de très lourd et d'assez douloureux. En fin de compte, ce procès, c'est la poussière qu'on met sous le tapis : "Allez, on fait un procès, et on passe à autre chose !" Ce n'est pas ma conception de la justice ni de la lutte contre le terrorisme islamiste international." Une réaction à écouter ici :
Me Philippe de Veulle : "une parodie de justice"
On nous explique que c'était de notre faute d'avoir été là au mauvais moment"
Dominique Cazin habite St Denis-en-Val, elle fait partie des victimes loirétaines de cet attentat. Elle a assisté à la première audience du procès, retransmise par visioconférence au palais de justice de Paris. Elle ne cache pas son amertume à l'issue du verdict : "On n'a pas eu de réponses à nos questions. Pourquoi y-a-t-il eu cet attentat, à ce moment-là, ce jour-là, pourquoi nous ?... J'ai eu le sentiment très très fort d'une sorte de foutage de gueule, que ce n'était pas si grave, que c'était de notre faute si on avait été là au mauvais moment, au mauvais endroit ! C'est ce que le président du tribunal a dit : "On peut mourir en vacances, pourquoi pas !" Il n'y a aucune reconnaissance de la responsabilité de la Tunisie. C'est décevant, et en plus, on est encore en pourparlers pour les indemnisations ; j'ai passé une nouvelle expertise médicale il y a quinze jours, on en est encore là quatre ans après... C'est très très long et c'est usant. Ce n'est pas arrivé en France, alors ce n'est pas grave..." Un témoignage à retrouver ci-dessous :
Dominique Cazin : "Un sentiment de foutage de gueule"
Le Parquet de Tunis a fait appel, il y aura donc un nouveau procès dans cette affaire.