Séquestration d'une adolescente à Caen : prison ferme pour quatre personnes
Le tribunal correctionnel de Caen a condamné, ce jeudi, quatre personnes (deux femmes et deux hommes) à de la prison ferme. Ils sont impliqués, à des degrés divers, dans la séquestration d'une adolescente de 16 ans en août 2014, rue de Bayeux à Caen.

Le tribunal correctionnel de Caen a condamné, ce jeudi 28 novembre, quatre personnes pour leur rôle dans la séquestration d'une adolescente de 16 ans, en août 2014, rue de Bayeux à Caen, en échange d'une rançon. Les peines vont de 18 à 5 mois fermes. Parmi les prévenus, deux sont reconnus coupables de séquestration, un de complicité de séquestration et un autre de non-assistance à personne en danger. Un autre homme, poursuivi pour détention et cession de stupéfiants dans ce dossier, a lui été relaxé par la justice.
Les faits remontent au 19 août 2014. L'adolescente de 16 ans, en rupture avec sa famille, revient d'un séjour à Paris avec trois amis parisiens, pour passer la soirée à Caen chez un autre couple d'amis, qu'elle connait depuis peu. Une transaction de cannabis est prévue. Lors de la soirée, tout le monde ou presque boit de l'alcool et fume du cannabis jusque tard dans la nuit. À un moment, le locataire se rend compte qu'il lui manque de l'argent. Les 600 euros, censés servir au paiement de la drogue, ont disparu d'un tiroir.
Giflée, menacée et ligotée
Il accuse immédiatement la petite dernière, celle qu'il connait à peine, âgée de 16 ans. Elle jure qu'elle n'y est pour rien. La nuit passe. Le lendemain, au petit matin, vers 6h30, elle est réveillée par le petit groupe d'amis qui lui ordonne de restituer cet argent qu'elle n'a pas. Le locataire et sa compagne lui assènent plusieurs gifles, la menacent et lui attachent les pieds avec deux tendeurs, sur le canapé.
"C'était pour la protéger car elle s'était cognée et elle était saoule", se justifie l'une des prévenues. "Ah oui, c'est comme ça que vous protégez les gens vous ? En les attachant ?", lui demande la présidente du tribunal. "Bah oui, c'est la seule solution que j'ai trouvé", lui répond la trentenaire, en fauteuil roulant à la barre, à la suite d'un accident de travail.
C'est simple, dans 15 minutes, soyez là, c'est mieux pour votre fille
En rappelant les faits, la juge insiste sur le fait que la porte était fermée à clé, "sans possibilité pour la victime de s'enfuir". C'est alors que le locataire, lui, appelle un ami "pour qu'il vienne filer un coup de main". Leur mission : retrouver, dans les rues de Caen, les trois amis parisiens de la victime, partis plus tôt de la soirée et potentiellement impliqués dans le vol de l'argent.
Ils reviennent une heure plus tard dans l'appartement pour retrouver la compagne du locataire et une autre amie "qui n'a pas bougé le petit doigt depuis le début", rappelle la procureure de la République. Un SMS est ensuite envoyé au père de la mineure. "C'est simple, dans 15 minutes, soyez là, c'est mieux pour votre fille". Par qui est-il envoyé ? À l'audience, chacun se renvoie la balle.
Un rendez-vous fixé avec le père de la victime
Le père, lui, prévient la police. Un rendez-vous fixé pour faire l'échange : les 600 euros en liquide contre sa fille. L'un des protagonistes part en éclaireur, "faire le guet" selon les mots de la présidente du tribunal. La transaction a lieu. La compagne du locataire arrive au lieu de rendez-vous, le visage recouvert d'une écharpe et munie d'un couteau de cuisine.
"Pourquoi un couteau ?", lui demande la juge. "Je n'en sais rien", répond-elle d'un ton blasé, avant de s'empresser d'ajouter. "Je me suis excusé au près de son père quand je lui ai amené sa fille." La présidente du tribunal embraye : "Vous étiez donc consciente de ce que vous faisiez." La prévenue sourit. "Non, quand on n'est pas à jeun, on ne se rend pas compte de grand-chose."
Je vais te retrouver, te trancher la jugulaire, tu rigoleras moins
Les policiers en civils, eux, suivent son retour à l'appartement et interpellent tout le monde. Ils perquisitionnent le logement et retrouvent 59 grammes de résine de cannabis dans le sac de la copine du locataire. L'un d'eux, celui accusé d'avoir fait le guet lors de la transaction, est arrêté chez lui. Il menace les forces de l'ordre. "Je vais te retrouver, te trancher la jugulaire, tu rigoleras moins". Puis, il est emmené au poste.
Au procès, les deux prévenus présents ont exprimé leur regret à la fin de l'audience. "Je reconnais qu'attacher quelqu'un, c'est idiot", explique la femme âgée d'une trentaine d'années.
Obligation d'indemniser la victime
Tous ont obligation d'indemniser solidairement la victime au titre de préjudice moral à hauteur de 3.500 euros, avec obligation de soins également. Celui qui a insulté les trois policiers lors de son interpellation doit les indemniser à hauteur de 500 euros chacun. Les trois agents s'étaient constitués parties civiles dans cette affaire.