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Yvelines : la fuite de pétrole sur un pipeline Total aura des conséquences à long terme
Les travaux de dépollution seront longs et "entièrement à la charge de Total", assure le ministre de l'Écologie, François de Rugy mercredi. Les riverains et agriculteurs s’inquiètent des dégâts. La compagnie pétrolière promet de "tout rendre dans la même état qu'avant".

Selon Total, 900 mètres cube de pétrole se seraient déversés sur environ huit hectares dans trois communes alentours : Vicq, Boissy-sans-Avoir et Autouillet, minant les récoltes de deux parcelles de champs et polluant l'eau de trois rus (Breuil, Le Lieutel et Coquerie). La fuite a été arrêtée mardi, a indiqué la préfecture des Yvelines. Pelleteuses, barrages, analyses... La compagnie pétrolière est désormais au travail et promet de rendre les terres "dans l'état où elles étaient avant la pollution". Mais les agriculteurs et les riverains sont inquiets.
Lundi matin, c'est un agriculteur, accompagné d'un garde rivière, qui a trouvé la fuite. C'est son voisin, alerté par l'odeur, qui lui a suggéré ce qu'il pensait être un problème sur les citernes de sa ferme. En remontant le ru, il tombe finalement sur un écoulement de pétrole dans un champ attenant. Depuis son champ de blé, il aperçoit au loin les pelleteuses qui terrassent le sol en vue d'y "stocker temporairement les terres polluées", indique un employé de Total, qui précise que les terres seront "traitées", pour certaines "recyclées".
Incertitudes et inquiétudes pour les agriculteurs et les riverains
Total "s'excuse" et promet une indemnisation pour les deux agriculteurs touchés. Pour Jérôme Corby, "c'est sûr, c'est foutu, il n'y aura pas de récolte" sur une partie de sa parcelle de neuf hectares, gorgée d'hydrocarbure. L'agriculteur avait semé du colza d’hiver en septembre. Il relativise : "C'est un manque à gagner, surtout dans cette période économique difficile, mais je ne suis pas inquiet pour cette année, il vont m'indemniser, les pertes sont facilement quantifiables". En revanche, "le préjudice de la perte de rendement sur plusieurs années sera plus difficile à évaluer, poursuit-il, le sol devra se remettre en place, il va falloir relancer l’activité microbienne".
Quant aux riverains, ils sont nombreux à vivre à proximité des ruisseaux contaminés. Le long de la maison de Claire, dans la commune de Vicq, coule Le Leutier. À quelques mètres de là, Total a installé un barrage filtrant. Le pétrole y est pompé, "jour et nuit", avant de laisser s'échapper "un filet d'eau" qui s'écoulera ensuite vers un second bassin de retenue. Claire "sent les odeurs de pétrole matin et soir". "Lundi, on avait la nausée, et quand on est sortis, ça sentait la station essence", se souvient-elle, attristée de devoir "fermer les portes" de sa maison, alors qu'elle "vient d'emménager à la campagne". "On a trois enfants, on est inquiets", déclare la mère de famille qui déplore "un manque d'information". Il y a bien eu une visite de l'adjoint au maire qui leur a conseillé de rester "à 15 mètres du cours d'eau", mais impossible de respecter la consigne, car "la rivière passe juste derrière", explique Claire.
Le chantier de dépollution sera long
Le captage de l'eau dans le secteur est interdit. Les champs pollués ne sont plus accessibles. Les opérations de dépollution devraient durer plusieurs mois, "peut-être six", indique un des employés de la compagnie. "Première préoccupation" pour Michel Charton, responsable raffinage et chimie de base en Europe pour Total : "Limiter la zone de pollution", à l'aide des barrages filtrants notamment. Puis, effectuer "une reconnaissance détaillée", au-delà de la zone identifiée des écoulements, afin de repérer d'éventuelles traces d'hydrocarbure.
Dimanche soir, une alarme s'était mise en route pour signaler une baisse de pression sur un tronçon du pipeline au départ du Havre, qui relie le dépôt de Gargenville (Yvelines) à la raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne). La raffinerie de Grandpuits ne fonctionne plus, l'acheminement est interrompu, "au minimum pendant 15 jours". Pour autant, Total assure qu'il n'y "pas de risque de pénurie de carburant" en Île-de-France.
Des contrôles insuffisants sur le pipeline ?
Sur ce tronçon reliant Le Havre à la raffinerie de Grandpuits, il y avait déjà eu un incident, en 2014, en Normandie. "Plus de 100 points du pipeline avaient alors été repérés sur ce tronçon, et avaient fait l'objet de réparations", se souvient Jérôme Goellner. "Cet endroit n’avait pas été identifié comme endroit présentant des défauts", ajoute le directeur de la Direction régionale et interdépartementale de l'Environnement et de l'Énergie (DRIEE). Après cet accident, il avait par ailleurs été décidé de réaliser des contrôles tous les cinq ans.
Apparemment, "c_ela n’a pas suffi dans les Yvelines"_, constate François de Rugy qui ne voit qu'un seul responsable : Total, "en charge du bon fonctionnement du pipeline". "Nous tirerons les conséquences avec le groupe Total et les autres gestionnaires de pipeline en France pour assurer la sécurité des transports d’hydrocarbure", a déclaré le ministre de l'Écologie, sur place mercredi.
Le dernier contrôle sur ce tronçon avait eu lieu en décembre. Selon la représente de France Nature Environnement, ces résultats devaient arriver jeudi. Alors qu'est-ce qui a pu causer cette rupture du tuyau, enterré à environ 80 centimètres de profondeur ? Total rejette d'emblée l'hypothèse d'une "agression extérieure", comme ça avait pu être le cas en 2014. Les causes pourraient être multiples, parmi lesquelles : la vétusté de ce pipeline datant de 1967, ou encore des "mouvements de terrain", s'interroge Marie-José Rossi-Jaouen qui sera "vigilante sur les expertises". "Si c’est Total qui fournit des résultats, on voudra des contre expertises", prévient-elle.
Vigilance autour de l'impact sur l'environnement
Elle craint en particulier pour la biodiversité, "des espèces protégées" qui se trouveraient notamment "dans les zones humides". La mesure des conséquences environnementales de cet accident va se dérouler "dans les 15 jours", sous surveillance étroite de l'État. C'est ce qu'a annoncé François de Rugy qui a "demandé au préfet de réunir toutes les semaines _un comité de suivi pour suivre l’avancée des travaux et le niveau de pollution__"_. La préfecture indique que "La police de l'eau de la direction départementale des territoires (DDT) va faire des prélèvements pour voir s'il y a de la pollution au-delà des zones touchées".
Quant à la nappe phréatique, il semblerait qu'elle n'ait pas été touchée, en raison de "l'imprégnation lente du terrain, du fait de la qualité argileuse des sols" et du "drainage agricole", rassure Michel Charton de Total. Selon l'entreprise, le pétrole ne se serait infiltré qu'entre 20 et 50 centimètres dans le sol, mais ça, "on n'en sait rien", rétorque le ministre de l'Écologie.
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