100 patients Covid, 40 infirmières en arrêt, opérations annulées : réunion de crise à l'hôpital de Montfermeil
Alors que les Franciliens commencent à vivre leur troisième confinement, les soignants eux affrontent la troisième vague de l'épidémie de Covid-19. À l'hôpital du Raincy-Montfermeil (Seine-Saint-Denis), la situation est devenue critique cette semaine. Reportage en pleine réunion de crise.
Vendredi 19 mars 2021, 13 heures : une trentaine responsables et chefs de services de l'hôpital du Raincy-Montfermeil (Seine-Saint-Denis) participent à une réunion de crise, dans le bureau du directeur ou en visio-conférence, pour faire le point sur la situation devenue critique dans ce centre hospitalier intercommunal.
100 patients Covid hospitalisés
"Actuellement, on hospitalise plus de 100 patients Covid, quand au début de semaine, on était à 60 patients. Et il y a l'aspect RH qui est très inquiétant car on a de nombreux arrêts", explique Quentin Demanet, le directeur délégué de l'hôpital. La journée de jeudi, par exemple, a été marquée par l'arrivée de 20 nouveaux patients atteints du virus et 6 arrêts maladie supplémentaires chez les infirmières.
Des infirmières épuisées en arrêt
D'après Lydia Pierre-Schull, la directrice des soins, il y a au total, tous services confondus, "une quarantaine d'infirmières arrêtées parce qu'elles ne sont pas bien, elles sont épuisées et cette fois-ci, nous n'avons pas d'aide comme l'an dernier". Effectivement, contrairement à la première vague, l'hôpital ne bénéficie pas de renforts d'élèves infirmiers ni de soignants venus d'autres régions.
Deux lits de réanimation disponibles ce vendredi dans le 93
"Mais tous les hôpitaux de la région sont dans le même cas que nous", relativise le directeur. Quant aux transferts de patients vers d'autres hôpitaux, "il y a un lit à Avicenne et un autre au Vert-Galant à Tremblay, soit deux lit de réa dans le 93" disponibles ce vendredi, assure Dany Toledano, la cheffe du service de réanimation.
"On a des soignants épuisés" - Lydia Pierre-Schull, directrice des soins
Fermeture de deux lits de réanimation, faute de personnel
Ce manque de personnel a des conséquences sur le service de réanimation à Montfermeil. Une vingtaine d'infirmières qui y travaillent habituellement sont en arrêt. Résultat : sur les 12 lits, 10 seront maintenus seulement à partir de lundi. Une situation déprimante pour Almecinda Chabas, cadre supérieure qui gère le pôle de réa mais aussi du bloc opératoire et des urgences : "Fermer deux lits de réanimation en pleine période de Covid.. j'ai un peu de mal".
Mais surtout, il y a cette lassitude de devoir toujours "s'adapter" et "bricoler" pour tenter de récupérer des lits. "En permanence et au jour le jour, on est obligés de s'adapter, on joue aux chaises musicales et c'est dangereux et épuisant pour le personnel. Tout le monde veut du renfort, mais il n'existe pas ! Et là, oui, je pense qu'on arrive au bout de ce qui est faisable", dit-elle.
"On arrive au bout de ce qui est faisable" - Almecinda Chabas, cadre supérieure
Des opérations déprogrammées jusqu'aux vacances de Pâques
Lors de cette réunion, les chefs de service sont unanimes, que ce soit en pneumologie, en cardiologie, en gastro, il sera difficile d'accueillir de nouveaux patients Covid. Les service sont à flux tendu. La direction de l'hôpital a décidé de déprogrammer toutes les opérations de son bloc ambulatoire au moins jusqu'aux vacances de Pâques. Des interventions plus importantes pourront aussi être reportées au "bloc central" si besoin, prévient le directeur."Tout ce qui est orthopédique par exemple. En revanche, toutes les opérations liées à la cancérologie seront maintenues", assure Quentin Demanet.
"Il y a un épuisement professionnel et psychologique plus fort" - Quentin Demanet, directeur délégué de l'hôpital
Une troisième vague "plus difficile à supporter humainement"
Le directeur de l'hôpital l'avoue : "humainement, cette troisième vague est bien plus difficile à supporter que la première... Quand on n'a pas le matériel mais qu'on a les bras et l'énergie on peut tout faire, mais quand aujourd'hui on a le matériel et qu'on arrive pas à faire parce que l'énergie n'est plus là et qu'on a plus assez de bras, c'est rageant".
Alors est-ce que ce nouveau confinement hybride en vigueur depuis ce 20 mars en Île-de-France, va aider les soignants ? Un confinement plus strict comme le premier, en mars 2020, n'aurait-il pas été plus efficace ? Pour Dany Toledano, cheffe du service de réanimation, cela aurait surtout été "difficilement supportable" pour les habitants de la Seine-Saint-Denis. Pour s'en sortir, une solution à privilégier pour selon elle :"il vacciner beaucoup et pour ça il faut avoir plus de doses !"
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