"Ils racontent mai 68 en Mayenne" | Épisode 2 - La classe ouvrière en fer de lance
En 1968 dans notre département et au contraire de Paris, ce ne sont pas les étudiants qui ont lancé la contestation mais la classe ouvrière, à travers de nombreuses manifestations. Les salariés des entreprises avaient à l'époque très peu de moyens de se faire entendre.
Les premières grèves dans les usines de la Mayenne débutent le 8 mai avec des manifestations intersyndicales d'ouvriers et de paysans. Les revendications sont simples : "une garantie de l'emploi, en agriculture comme dans l'industrie, avec un revenu décent" explique un tract du Syndicalisme Agricole (voir ci-dessous).
Usines fermées, gare bloquée
Ce jour-là, une centaine de manifestants se rassemblent à Laval à 10h30 place de la gare. Dans le même temps à Renazé, 300 salariés des ardoisières participent à un meeting. 250 personnels d'hôpitaux et de la fromagerie Perrault défilent à Château-Gontier. La contestation monte, le patronat écoute la classe ouvrière d'une oreille et dix jours plus tard, la gare de Laval est bloquée par les cheminots. Un épisode dont se souvient très bien Jacques Poirier, membre actif du Parti Communiste. Ce samedi 18 mai, par solidarité, l'homme emmène ses camarades les soutenir.
"Cela n'a jamais été violent sur Laval mais c'était chaud"
"On avait décidé d'aller dire bonjour aux cheminots. En arrivant devant la gare, ils sont sortis avec des bâtons parce qu'ils croyaient que les jeunes venaient leur casser la gueule parce qu'ils occupaient la gare et qu'ils bloquaient les trains. Mais heureusement, Paul Paris secrétaire général du PCF les a tout de suite rassuré : 'hé les gars arrêtez c'est un copain arrêtez, arrêtez' (sourire)".
Peu d'élus mayennais soutiennent alors le mouvement. Il y a bien Paul Hainry le maire de Voutré et celui de Saint-Charles-la-Forêt Pierre Corniette. En fait, la classe ouvrière se confronte à des élus locaux, gaullistes et de droite pour la majeure partie d'entre eux. On note alors quelques moments de tensions parfois. À Laval, dans l'avenue Robert Buron par exemple. "Francis Le Basser, sénateur-maire de l'époque, descend la rue en voiture et tombe sur une manifestation. Je peux vous dire que ça lui a tapé sur le capot pas mal" explique Jacques Poirier, dans le cortège à ce moment-là. "Les manifestants lui ont demandé de les soutenir. Cela n'a jamais été violent sur Laval mais c'était chaud" termine le militant communiste.
"Il y avait une classe ouvrière qui n'avait pas d'histoire dans le département"
La classe ouvrière mayennaise reprend progressivement le chemin des entreprises le 4 juin 1968 en obtenant certaines garanties sur les conditions de travail. Grâce aux accords de Grenelle du 25 et 26 mai, le salaire minimum interprofessionnel garanti une augmentation de 35 %. Les textes prévoient aussi la création de la section syndicale d'entreprise.

