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INFO FRANCE BLEU - Violences sexuelles à Cherbourg : le parcours du combattant pour déposer plainte
Elles avaient 13, 14, 16 et 17 ans. Elles disent avoir été agressées sexuellement ou violées à Cherbourg. Les quatre jeunes femmes, aujourd'hui majeures pour la plupart, décident de porter plainte au commissariat. "On va vous rappeler" c'est ce que leur disent les policiers.

Les quatre jeunes filles avaient 13, 14, 16 et 17 ans. Elles ont décidé de porter plainte, ensemble au commissariat de Cherbourg pour agressions sexuelles et/ou viols. C'était le 9 juin dernier. France Bleu Cotentin était présente. Ce jour-là, les plaintes n'ont pas été prises.
Obligation de recevoir toutes les plaintes
C'est inscrit clairement dans le code de procédure pénale. Il s'agit de l'article 15-3 :
Les officiers et agents de police judiciaire sont tenus de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale, y compris lorsque ces plaintes sont déposées dans un service ou une unité de police judiciaire territorialement incompétents. Dans ce cas, la plainte est, s'il y a lieu, transmise au service ou à l'unité territorialement compétents.
Ce mardi 9 juin, aux alentours de 16h30 une dizaine de personnes est devant le commissariat. Des victimes, mais aussi des amis venus les soutenir. Deux personnes à la fois peuvent accéder au commissariat. C'est Annabelle* qui entre la première : "Bonjour, on voudrait porter plainte pour agressions sexuelles et viols." La femme présente à l'accueil appelle son chef.
"Pourquoi vous venez toutes aujourd'hui ?"
Il entre dans la pièce et enchaîne les questions : "Ç_a s'est passé quand ? Vous étiez mineure ? Quel est le dénominateur commun, je ne comprends pas ?_ La femme de l'accueil ajoute : Pourquoi vous venez toutes aujourd'hui ? Quelle profession fait cet homme là ? Quel est le lien entre vous ?"
Annabelle* ne s'attendait pas à ces questions : "Je n'ai même pas pu raconter ce qui s'était passé". Plusieurs minutes plus tard, les autres jeunes filles entrent au commissariat. Les plaintes ne seront pas prises ce jour-là, mais "on va vous rappeler" disent les deux policiers.
Charline* elle aussi ne s'attendait pas à être reçue de cette façon-là.
"Il m'emmène dans une petite pièce. Il me demande mon nom, mon prénom et mon numéro de téléphone. Le policier note ça sur une feuille blanche avec un crayon à papier. Il ne s'est même pas présenté. J'ai commencé à lui raconter... Il m'a répondu : "Non mais c'est bon, pas besoin de tout m'expliquer, tu me dis ça en deux mots et c'est tout, pas besoin d'aller dans les détails, on s'en fiche." Charline continue : "quand il me demande ça fait combien de temps, je réponds que ça fait un an et il m'engueule en me disant pourquoi t'es pas venu porter plainte avant ?"
La jeune femme de 18 ans aurait subi un viol l'année dernière sur le parking de la Cité de la Mer.
On était dans sa voiture et il a commencé à me toucher un peu partout. Je faisais que d'enlever ses mains. Il était sur mes seins. Je lui disais non. C'était non, non. Il a forcé au moins 20, 40, 50 fois en même pas 30 minutes. J'étais piégée. A la fin, j'ai dit oui parce que je ne voulais pas être toute seule en plein milieu de la nuit à une heure du matin. Il me faisait quand même peur. Pendant un moment je me suis demandée si ce n'était pas de ma faute. Mais c'était un viol. Il a forcé. Je ne voulais pas. Il l'a fait quand même. Il n'a pas respecté mes choix.
Charline est rappelée une première fois le 11 juin. Un rendez-vous est fixé par le commissariat, puis annulé trente minutes avant. Ce lundi 27 juillet, elle reçoit finalement un nouveau coup de téléphone. Elle a pu déposer plainte, 48 jours après sa venue au commissariat.
"Je trouve ça déplorable"
Annabelle* a 20 ans. Elle ne portera finalement pas plainte. Elle était pourtant prête à "s_ortir du silence"_.
J'avais 13 ans, j'étais au collège. Je montais les escaliers et il était là, avec ses copains. Il m'a bloquée et il me touchait les parties génitales et la poitrine.
Mais en rentrant chez elle : "Mes parents n'étaient pas d'accord pour que je porte plainte. Ils ne voulaient pas d'emmerdes, mon agresseur, c'est mon voisin. J'ai donc décidé de ne pas porter plainte." C'est ce qu'elle a dit au commissariat quand elle a été appelée le 11 juin dernier.
La police assure avoir respecté le protocole
Après de nombreuses sollicitations, le commissariat a finalement accepté de nous répondre. Il assure que ce n'est pas une question de moyens mais plutôt d'urgence. Les agressions sexuelles et les viols se seraient déroulés ces dernières années. Ils seraient donc moins prioritaires que des agressions plus récentes.
De son côté, dans un communiqué, le Syndicat des Cadres de la sécurité intérieure indique que les services de police "agissent de façon professionnelle dans le respect des protocoles établis". Il rappelle que dans le cas présent, les fonctionnaires spécialisés dans ce type de plainte étant déjà en audition, et les faits étant anciens, une prise de plainte différée sur rendez-vous était tout à fait envisageable. Le syndicat considère enfin que les jeunes femmes ont eu droit aux explications nécessaires.
* Tous les prénoms ont été changés.
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