- Accueil
- Occitanie
- Hérault
- Infos
- Société
- L'incroyable confidence du skipper Kito de Pavant : "J'ai peur de l'eau"
L'incroyable confidence du skipper Kito de Pavant : "J'ai peur de l'eau"
Pendant les vacances de Noël, France bleu Hérault vous propose une série d'interviews de personnalités de l'Hérault. Ce jeudi matin, nous recevons le skipper Kito de Pavant. Il nous parle de sa vie, sa passion de la mer née il y a 50 ans, ses succès, ses échecs, sa famille.

France bleu Hérault vous propose, pendant les vacances de fin d'année, une série d'interviews de personnalités de l'Hérault. Ce matin nous recevons Kito de Pavant, de son vrai nom Christophe Fourcault de Pavant, navigateur né dans le Périgord il y a 60 ans. C'est là qu'il a tiré ses premiers bords sur un étang avant de venir s'installer près de la Grande Bleue avec sa famille. Kito de Pavant l'un des rares Méditerranéens a avoir gagné la célèbre Solitaire du Figaro (en 2002). Il a du abandonné récemment dans la transat Jaques Vabre entre le Havre et la Martinique et espère être au départ de la prochaine Route du Rhum.
Kito de Pavant Bonjour, bonjour ! D'où vient ce surnom, Kito ? Quelle est la première personne qui vous a appelé comme ça ?
Ah ça, ça remonte à il y a 50, 60 ans. Voilà, ma grande sœur qui est arrivée sur cette planète un an avant moi, avait du mal à prononcer mon vrai prénom Christophe. Kito est arrivé assez vite et c'est resté. Et c'est assez marrant parce qu'aujourd'hui, je signe des autographes à des gamins qui s'appelle Kito. Après le Vendée Globe il y a 30 ans on a eu une flopée de Titouan. Et aujourd'hui, il y a quelques Kito qui circulent.
Vous parlez de votre votre famille. Vous êtes installé aujourd'hui dans l'Hérault, mais beaucoup ne savent peut-être pas que vous n'êtes pas né au bord de la mer. Vous venez de Dordogne ?
Oui, oui, oui. Y'a rien qui me prédisposait à devenir marin puisque effectivement, je suis né en Dordogne, où la mer est quand même assez loin. Voilà. Et j'ai commencé d'ailleurs à naviguer en Dordogne sur un petit étang qui fait 200 mètres de large. Pas plus.
Ce qui vous a valu un livre il y a quelques années : "Le plus grand navigateur de tous l'Étang" ?
Exactement. Parce que je racontais mes tout débuts sur cet étang là. C'était une belle expérience. J'étais gamin.
"J'ai commencé à naviguer en Dordogne sur un petit étang qui fait 200 mètres de large. Pas plus."
Et donc après, vous êtes venu quand même assez rapidement naviguer en Méditerranée ?
Mes parents ont déménagé de la Dordogne quand j'avais une dizaine d'années. Ils se sont installés au bord de la Grande Bleue, au Grau du Roi. Mon père était médecin. Il a même créé un cabinet au Grau du Roi. Et moi, j'ai découvert un truc essentiel qui était la mer que je connaissais pas, même si j'avais déjà vu parce que l'on est allé en vacances sur l'Atlantique, notamment. Mais j'ai découvert cet univers là avec des bateaux. Et puis, j'ai appris à naviguer à Port Camargue et depuis, je n'ai jamais arrêté.
Vous avez fait beaucoup de courses. Est-ce que la Solitaire du Figaro, dont on dit que c'est l'une des courses les plus difficiles à gagner en solitaire, est la victoire dont vous êtes le plus fier ?
Oui, parce que c'est vrai que la Solitaire du Figaro, c'est vraiment la référence en France et donc dans le monde, puisqu'on est quand même les seuls à faire de la course au large. C'est la référence de la course en solitaire. Tous les skippers français et tous les gens qui font de la voile en France rêvent de faire d'abord la Solitaire du Figaro et éventuellement, de la gagner. Ca reste un mythe pour un navigateur. Et moi, je me souviens que quand je l'ai fait pour la première fois, c'était en 2000 et c'est arrivé très vite puisque j'ai gagné en 2002. J'étais très, très fier parce que c'était vraiment pas programmé. Je ne pensais pas être capable de gagner cette solitaire.
"J'ai horreur de l'eau. Je ne prends aucun plaisir dans l'eau et j'ai même peur de l'eau."
Il y a donc cette victoire. Il y en a eu d'autres. Et puis, vous avez malheureusement eu aussi assez souvent des avaries : choc avec un chalutier, un bateau qui démâte, une collision avec une baleine. Est-ce que vous avez déjà eu peur de mourir quand vous étiez sur l'eau ? Ou peur tout court, d'ailleurs ?
La peur, c'est quelque chose, un sentiment qui est très, très fort, c'est qu'on ne maîtrise plus grand chose. Non, je pense que j'ai évidemment de l'appréhension. Le stress fait partie de notre vie de marin. D'abord, partir, traverser un océan, mais partir faire une course, quelle qu'elle soit, il y a du stress, mais peur de mourir ? Non, j'ai jamais eu ce sentiment. Des problèmes qui ont pu mal se terminer. Je pense notamment à ce fameux Vendée Globe où j'ai percuté une baleine, mais j'ai toujours eu beaucoup de chance pour que ça se termine bien. Un truc dont j'ai peur, c'est l'eau. J'ai horreur de l'eau.
Vous ne savez pas nager ?
Si je sais nager et très bien, mais j'ai peur de l'eau. Je ne prends aucun plaisir à aller dans l'eau. C'est notre danger numéro 1. Se noyer, c'est quelque chose de terrible. Et c'est vrai que je me souviens quand j'étais plus jeune, j'ai eu une fois une vraie frayeur pour sauver mon bateau. J'étais obligé d'aller dans l'eau pour décoincer un truc qui bloquait le safran. J'avais investi dans un bateau qui était trop cher pour moi et j'allais le perdre, il fallait fallait y aller. J'ai eu peur de me noyer sous le bateau. J'ai eu très, très peur, mais bon, j'ai réglé le problème et finalement, j'ai eu la chance de sauver le bateau et aussi ma peau. C'est un mauvais souvenir.
"Je ne suis pas une tête brûlée, je ne prends pas plus de risque en mer que sur terre."
Les vagues qu'on imagine gigantesques quand on est dans les mers du Sud, ça n'effraie pas ?
Ça peut effrayer par moments. Mais en fait, c'est aussi une part de plaisir. C'est ce qu'on va chercher quand on fait ce métier là. Se retrouver finalement dans un monde qui est plutôt hostile mais qui nous crée effectivement de belles sensations. On va chercher ça. Et quand on arrive à maîtriser un certain nombre de choses, le bateau ou le matériel qu'on utilise, on sait que si jamais il se passe quelque chose, on a quand même des moyens de secours qui sont importants. On n'est pas des têtes brûlées. Je ne suis pas une tête brûlée.Je n'ai pas l'impression de prendre plus de risques quand je pars en mer que quand je suis à terre.
Quand vous êtes sur l'eau, qu'est-ce qui vous plaît ? Pourquoi vous allez sur l'eau d'ailleurs ?
Là, je reviens d'une Transat Jacques Vabre qui ne s'est pas très bien passée. On a pas été très bon et puis on a cassé du matériel, donc le bilan n'est pas très positif. Mais je sais que je n'ai qu'une envie : c'est de repartir en 2022. Il va y avoir la Route du Rhum. J'espère que j'y serai.
"Le bateau c'est une drogue dure."
Est-ce que vous fuyez quelque chose quand vous allez sur l'eau ? On pourrait le comprendre. En ce moment, la vie est compliquée sur Terre.
Non, je pense que c'est plus simple que ça. J'adore cet environnement là. C'est une drogue dure.Le bateau, l'océan, la mer, les choses qu'on vit en mer, c'est quelque chose d'extraordinaire qui est finalement réservé à très peu de monde. Il y a très, très peu de monde qui peut profiter de cet environnement là dans les conditions que l'on vit. Il y a des belles journées et des journées plus difficiles. Quelquefois, il fait très chaud, quelquefois il fait très froid. Quelquefois, les histoires sont un peu moins drôles, mais à chaque fois, c'est un bonheur de se retrouver dans cet univers là. Ça fait maintenant 40/50 ans que je vis ça et je ne m'en lasse pas.
Votre famille ne vous manque pas ? Vous avez plusieurs enfants, votre épouse Françoise, qui est très présente dans vos projets...
La famille, on ne la quitte pas longtemps. Elle est toujours présente au départ et à l'arrivée. Et d'ailleurs, sur toute l'année, ma femme travaille avec moi sur la préparation du bateau. Donc on ne se quitte que quelques semaines. Et même pendant ces semaines où on est au large, on a quand même des contacts. Les enfants sont autonomes, ils sont grands maintenant, donc ils n'ont plus besoin de moi comme c'était le cas quand ils étaient petits. C'est d'ailleurs une raison pour laquelle moi, j'ai commencé à faire de la course au large d'une manière un peu professionnelle, assez tard. Je n'ai jamais osé partir tant qu'ils n'étaient pas autonomes.
Si vous n'aviez pas été skipper. Qu'est-ce que vous auriez pu faire comme métier ?
Si mes parents étaient restés en Dordogne, je ne serais sûrement pas devenu marin. Ça, c'est une certitude. Peut-être j'aurais fait de la compétition d'équitation puisque c'était ce que je faisais le plus quand j'étais tout petit. Peut-être que j'aurais aimé être architecte.
Et vous aimez bien écrire et raconter des histoires ?
Je ne suis pas écrivain quand même non plus. J'aime bien écrire, c'est vrai, j'aime bien partager les choses. Je crois que les gens qui me lisent apprécient les petites cartes postales que je renvoie tous les matins quand je suis en mer. J'aurais pu, oui, peut-être être journaliste. Ma fille est journaliste. Mon fils est menuisier. Et ça, c'est un truc que j'aurais aimé faire.
"Un jour il faudra bien que j'arrête de naviguer, mais aujourd'hui, je profite des années qui me restent."
Pensez-vous à arrêter de naviguer un jour?
J'y pense forcément, le temps défile. Moi, j'ai 60 ans. Un jour, je pourrais plus faire ce que je fais là. Pour l'instant, je profite des années qui me restent. Je vois autour de moi des gens qui ont le même âge que moi qui ont pas mal de problèmes de santé. C'est quand même un sport complet, difficile. Donc il y a un jour, je serai un peu contraint de m'arrêter de courir. Mais je pense que tant que l'envie est là, je pense qu'on n'y arrivera.
Pour finir, on est là au moment de la période des Fêtes. Est-ce que c'est un moment que vous appréciez les fêtes de Noël, du Nouvel An, en famille, avec les amis, où, justement, vous préférez être loin de tout ça ?
J'ai un peu horreur de cette période là où on est obligé de voir la famille, de faire des cadeaux. Et c'est vrai que pendant très longtemps, j'ai fui un peu cette période là. J'avais une bonne excuse. En général, j'ai toujours un bateau à convoyer à l'autre bout du monde ou une course à faire. Et puis là, c'est vrai qu'on est un peu rattrapé par la patrouille. J'ai des enfants, j'ai des petits enfants maintenant. Voilà, et on est un peu contraints par ça. Mais si on arrive à se dégager de ça, on le fait avec plaisir. Je n'aime pas trop cette période.
Ma France : s'adapter au coût de la vie
Vous constatez l'augmentation constante des prix et la diminution de votre pouvoir d'achat ? Vous avez trouvé des astuces, des bons plans, vous avez changé certaines de vos habitudes pour vous adapter à l'inflation ? Réparation, covoiturage, location, échanges de services... France Bleu, en partenariat avec Make.org , vous invite à partager vos idées originales et solutions concrètes du quotidien, et à donner votre avis sur celles d'autres citoyens. Trouvons ensemble les moyens de faire face à la vie chère !