27 août 1944 : Gisèle Maniez et Raymond Pattaro racontent la libération de Clermont-Ferrand
Issue d'une famille de résistants, Gisèle Maniez se souvient avec émotion du départ des Allemands de la capitale auvergnate. Une libération et une liesse qu'a également vécu Raymond Pattaro, jeune résistant puydômois. 75 ans après, leurs souvenirs sont intacts.

La ville de Clermont-Ferrand célèbre ce mardi le 75e anniversaire de sa libération. Une délivrance pour les Clermontois qui ont convergé sur la place de Jaude pour fêter le départ des troupes allemandes dans "la haine et et l'allégresse". Deux témoins ont fouillé dans leurs souvenirs pour nous raconter "leur" libération". Les yeux pétillants.
Gisèle Maniez, âgée de 92 ans, habite à Beaumont (Puy-de-Dôme). Elle n'avait que 17 ans lorsque la ville de Clermont-Ferrand est libérée. Fille et sœur de résistants (et future femme de maquisard), elle répète sans lassitude sa fierté d'appartenir à une famille qui a lutté sans relâche contre l'occupant. Son père et son frère ont été arrêtés par la Gestapo. Un cousin a été fusillé à Beaumont à l'âge de 18 ans.

Le dimanche 27 août 1944, sous un ciel lourd et menaçant, elle revenait de son cours de musique (violon) avec sa sœur de 15 ans. De retour à la maison vers midi, elles ont vu un défilé incessant de véhicules ennemis quittant la capitale auvergnate. Les Allemands leur jettent des caramels, mais les deux adolescentes les renvoient sans ménagement aux expéditeurs. En comprenant que le jour de la Libération était venu, elles ont couru jusqu'à la place de Jaude pour faire la fête dans une joyeuse cacophonie.
Gisèle Maniez se souvient du dimanche 27 août 1945
Le visage radieux et les yeux pleins d'amour, Gisèle raconte le jour où un jeune garçon, qui prenait des cours de musique avec elle et sa sœur, est venu frapper à la porte parentale pour demander l'autorisation au père de famille d'emmener danser sa fille. D'abord réticent, il accepte sous la surveillance paternelle. Elle dit avoir "dansé toute la nuit à la Cigale". Ce jeune résistant deviendra son mari (décédé il y a quelques années). Elle avoue "ne pas encore avoir complètement fait son deuil". Pour honorer la mémoire de tous ceux qui ont perdu la vie pour sauver celle des autres et libérer la France, Gisèle Maniez participe dès que possible aux cérémonies d'hommage. Un devoir de mémoire transmis à son fils désormais porte-drapeau.

Tout le monde s'est jeté sur la place de Jaude pour fêter ça" - Raymond Pattaro
Né en 1926 à Beaumont (Puy-de-Dôme), de parents immigrés italiens, Raymond Pattaro vit aujourd'hui à Aydat. Il est entré très jeune en résistance. Dès 1943, il distribue des tracts, mais participe aussi et surtout aux actions de sabotage, notamment de convois destinés à la déportation. Le 17 juillet 1944, il est arrêté par des Gestapistes français. Libéré en août 1944, Raymond Pattaro endosse l'uniforme des FFI jusqu'à la fin de la guerre.
Mais le temps n'a en revanche pas de prise sur ses souvenirs de ce 27 août 1944. "C'était l'euphorie dans le centre-ville. La place de Jaude était noire de monde. Les voitures FFI arrivaient de partout. Du Mont Mouchet, de Ceyssat, de Pontgibaud... Il y avait des rires et des pleurs de ceux qui avaient perdu des membres de leur famille. Tant que les Allemands étaient là, nous étions privés de liberté. Nous étions soumis. Toutes les petites usines de Clermont-Ferrand étaient réquisitionnées par les Allemands pour travailler pour eux. Tout le monde s'est retrouvé soulagé".
Roger Pattaro raconte le jour de la libération de Clermont-Ferrand

Après la guerre, Raymond Pattaro a fait carrière chez Michelin, avant d'œuvrer aussi pour la préservation patrimoniale de l'église et du cimetière du Ponteix. Le résistant puydômois a reçu l'insigne de Chevalier de l'ordre national du Mérite en juillet 2017. Il était encore récemment président du Comité Départemental d'Union de la Déportation du Puy-de-Dôme. Malgré ses 94 ans et des difficultés d'audition, il était présent vendredi dernier à la cérémonie d'hommage aux cinq jeunes volontaires FFI fusillés le 23 août 1944, rue des Galoubies, à Chamalières.