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"On fait ce qu'on peut" : un après-midi dans un EPHAD, un an après les mobilisations
Ce jeudi, des soignants des EPHAD de la région rejoignent les urgentistes qui se mobilisent devant l'Agence Régionale de Santé à Dijon : ils réclament des effectifs supplémentaires. Qu'ont apporté les mobilisations dans les EPHAD en 2018 ? Peu de réponses apparemment : reportage.

En 2017 et 2018, la mobilisation avait été très forte dans les EPHAD (Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), notamment à Semur-en-Auxois et Saint-Jean-de-Losne, les soignants demandaient des effectifs supplémentaires. Un an plus tard, la situation ne semble pas s'être arrangée : ce jeudi des soignants des EPHAD de la région rejoignent le rassemblement des urgentistes qui a lieu devant l'ARS (Agence Régionale de Santé) à Dijon. Le quotidien dans les maisons de retraite, on en parle souvent, mais alors comment ça se passe ? Nous avons passé un après-midi dans l'EPHAD privé De Vigne Blanche à Gevrey-Chambertin. Là-bas, pas de sous effectif, malgré tout cela tourne à flux tendu.
"Quand il manque du monde, parfois on ne peut pas faire comme on voudrait"
Après la toilette du matin, le déjeuner, la sieste et le change, arrive l'heure du goûter dans la salle commune en vitrages : un moment pour souffler. "C'est le moment où on peut vraiment être avec les résidents et parler avec eux, en même temps qu'on leur donne le goûter," explique l'une des soignantes. A cette heure-ci, elles sont trois pour les 61 résidents.
"Le moment que j'aime le moins c'est le coucher, car je me retrouve seule" - Émilienne, résidente
Le goûter, c'est le moment qu'Émilienne, pensionnaire préfère dans sa journée : "un moment de détente. Le moment que j'aime le moins, c'est le coucher car je me retrouve toute seule. Ici elles sont toutes gentilles elles restent avec nous, elles sont dévouées." Ce qui frustre parfois Laurence, soignante, c'est ne pas pouvoir passer plus de temps à leurs côtés : "quand on rentre le soir, on se demande si on a bien tout fait, rien oublié. On fait ce qu'on peut, c'est vrai que parfois on est un peu en colère car quand il manque du monde on ne peut pas faire comme on voudrait : prendre le temps, faire vraiment notre boulot correctement__. Enfin, on le fait quand même ! Mais la qualité pourrait être améliorée."
Un employé en plus, parfois ça ne serait pas de refus. "On aurait plus le temps pour discuter avec eux, les chouchouter. C'est pas toujours évident, ajoute Laurence, on peut pas se lancer dans quelque chose qui va prendre du temps car on est toujours dérangé par les sonnettes, les gens qui sont dans les chambres ou au salon, s'ils ont besoin d'aller aux toilettes, il faut y aller." C'est ce que confirme la directrice de l'EPHAD, Patricia Robert : "on n'est pas en sous-effectif, mais quand on a une absence et pas de remplaçant en face, là le problème resurgit."
Une douche par semaine et par pensionnaire
Jocelyne, vient souvent voir sa sœur Martine, handicapée. Selon elle, ici, on est bien traité, mais la douche se fait un peu rare : "la toilette se fait tous les jours, mais la douche une fois par semaine. Peut-être que pour le bien-être des pensionnaires, des employés supplémentaires permettraient des douches plus régulières, surtout pendant les périodes comme on a eu cet été avec la canicule."
"Il faudrait faire plus pour les EPHAD, pour nous, les soignantes sont très importantes" - Jocelyne, la sœur d'un résidente
"J'en ai vu certains cajoler, consoler des résidents qui pleuraient. Les aides-soignantes sont là pour les soigner, explique Jocelyne. Il faudrait trouver plus d'animatrices ou autre, penser d'avantage au personnel, aux accompagnants et peut-être faire plus pour les EPHAD, ils ont quand même du mérite ! Moi je leur dis merci pour tout ce qu'ils font." Elle ne pourrait pas s'occuper de sa sœur, "au début je m'en occupais mais arrivé à un âge, on ne peut pas s'occuper de tout. Tandis que les aides-soignantes, c'est leur métier. Elle sont capables de s'en occuper au mieux. Pour nous, elles sont très importantes."
Les résidents arrivent de plus en plus âgés et dépendants
Depuis 10 ans à ce poste, la directrice Patricia Robert a vu les résidents arriver de plus en plus âgés : "le maintient à domicile fait que les personnes restent plus longtemps chez elles. Nous avons des personnes qui sont aujourd'hui très dépendantes au sein de la résidence. C'est pourquoi il y a beaucoup d'accompagnement dans les gestes de la vie quotidienne, beaucoup de souffrance aussi de la part de ces résidents qui n'ont pas forcément envie de venir en Ephad et cette souffrance peut être répertoriée sur le personnel aussi." Aujourd'hui 45 résidents sur les 61 sont considérés comme complètement dépendants. Ce qu'il faudrait selon Patricia Robert, c'est un salarié en plus à temps plein dans son établissement, pour faciliter le travail.
"Depuis 2018, on n'a rien obtenu" réagit le syndicat CFDT
"Depuis la mobilisation inédite de 2018, on a rien obtenu, les difficultés sont encore très importantes," rage Christine Pelletier, secrétaire départementale CFDT 21 santé. Il y a eu des rapports des parlementaires, une concertation grand âge autonomie, mais globalement, rien n'a changé : "maintenant on a du personnel qui fuit le secteur. Il y a une difficulté à recruter car ce n'est pas attractif, mal payé, les conditions de travail sont difficiles, c'est un secteur qui est pas financé. On ne peut pas envisager dans ces conditions envisager un bain-douche par résident et par semaine. Par exemple à Bligny-sur-Ouche, c'est un petit Ephad, il y a plus que deux salariés le soir pour coucher 50 résidents."
Philippe Poutou, syndicaliste et leader du Nouveau Parti Anticapitaliste sera présent ce jeudi devant l'ARS.
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