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TEMOIGNAGES - Les travailleuses du sexe à Besançon : "C'est juste impossible de garder des gestes barrières"

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L'association bisontine Partage, droit et autonomie (PDA) alerte sur la situation des travailleuses du sexe pendant le confinement. Dans la rue, elles ne peuvent plus travailler et côté escort, elles tâchent de s'adapter à la crise sanitaire. Une mission "impossible", pour autant, elles essaient.

D'après l'association bisontine Partage, droit et Autonomie, il y aurait une quinzaine de travailleuses du sexe exerçant dans la rue. D'après l'association bisontine Partage, droit et Autonomie, il y aurait une quinzaine de travailleuses du sexe exerçant dans la rue.
D'après l'association bisontine Partage, droit et Autonomie, il y aurait une quinzaine de travailleuses du sexe exerçant dans la rue. © Maxppp - Sebastian Gollnow

Composée de travailleuses du sexe et d'allié.es, l'association Partage, droit et autonomie (PDA) a été créée à Besançon (Doubs) en 2014. Aujourd'hui composée d'une dizaine de femmes, PDA alerte sur la situation des travailleuses du sexe pendant le confinement

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A Besançon, la quinzaine de travailleuses du sexe qui exerce dans la rue a été privée de travail pendant les confinements

Selon l'association, à Besançon, une quinzaine de femmes exerceraient dans la rue et auraient donc été quasi-totalement privées de travail pendant les confinements. Quant à leurs collègues escort-girl, qui trouvent leurs clients via des sites internet et travaillent ensuite chez elles ou chez les clients, certaines ont repris le travail malgré le reconfinement, sans pouvoir respecter les gestes barrières. 

Fanny, Mélodie et Mylène (leurs prénoms ont été modifiés pour garantir leur anonymat), sont toutes les trois membres de l'association PDA et escort à Besançon et pour elles, les plus à plaindre, se sont leurs collègues travaillant dans la rue. A Besançon, elles exercent sur plusieurs parkings : Isenbart, Battant, de la Gare, en haut de la rue des Frères-Mercier et rue de Dole. Seulement voilà, confinement oblige, elles ont dû totalement arrêter de travailler. 

Dans la rue elles sont quasiment toutes étrangères et elles se retrouvent privées de ressources"

Si Mélodie, 36 ans, membre fondatrice de PDA, connaît si bien la situation de ses collègues "de la rue", c'est parce qu'avant les confinement, l'association faisait régulièrement des maraudes pour apporter du matériel aux travailleuses du sexe en extérieur. "On a tout ce qu'il faut : préservatifs, gel lubrifiant, gel hydroalcoolique, lingettes désinfectantes, un peu de nourriture aussi", les sacs n'attendant plus qu'à pouvoir être distribués, dès que la situation sanitaire le permettra. 

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"Vers la fin du reconfinement elles avaient un peu repris parce que la police, apparemment, fermait les yeux sur le fait qu'elles reprennent le travail, c'était un moment où il n'y avait plus vraiment de répression sur le fait de ne pas suivre les règles du confinement", poursuit Mélodie. Désormais, avec le couvre-feu, impossible de savoir si les forces de l'ordre auront la même tolérance. Beaucoup vont donc de nouveau cesser le travail et être privées de ressources.

L'association PDA a créé une cagnotte pour venir en aide aux travailleuses du sexe de la rue

En attendant, l'association réfléchit à d'autres manières de venir en aide aux travailleuses du sexe de la rue. "On a lancé une cagnotte pour essayer de rassembler des fonds pour aider les collègues qui ont dû arrêter de travailler à cause des restrictions de déplacement et de couvre-feu", détaille Mélodie. 

Mélodie et ses collègues pensent aussi à augmenter leurs tarifs à elles, escorts qui continuent de travailler, pour pouvoir reverser une partie de leurs gains aux travailleuses du sexe de la rue. 

J'ai augmenté mes tarifs parce que je considère qu'il faut une prime de risque"

Si Mylène a augmenté ses tarifs, c'est pour aider ses collègues, mais aussi pour avoir une "prime de risque", comme elle dit. La jeune femme de 25 ans exerce le métier d'escort depuis deux ans. Elle a un profil sur un site internet et de potentiels clients lui envoient des messages. Elle fait ensuite le tri entre les demandes sérieuses et celles qui ne le sont pas. Puis elle et son client se donnent rendez-vous, soit à son domicile, soit à celui du client. 

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Pendant le premier confinement, elle a arrêté de travailler. Mais au second, pour l'argent et parce qu'elle "aime son métier", elle a décidé de reprendre. Son tarif est passé de 150 à 200 euros de l'heure. Une augmentation de cinquante euros, "parce que je risque quand même de me prendre une amende, quand je circule à 23 heures pour revenir d'un rendez-vous c'est pas un horaire de bureau, clairement", explique Mylène. 

Les soignants sont en première ligne, mais nous les travailleuses du sexe, on n'est pas non plus sur les dernières lignes"

Mylène considère que dans son métier, c'est "impossible ou presque de garder des gestes barrières". Pour elle, "les soignants sont en première ligne, c'est vrai mais nous les travailleuses du sexe on n'est pas non plus sur les dernières lignes"

Pour autant, elle prend des précautions. Déjà avant le coronavirus, elle aérait sa chambre avant et après ses rendez-vous, elle demandait systématiquement à ses clients de se laver les mains avant et le faisait elle aussi et bien sûr, elle changeait ses draps. 

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Les escorts essaient de mettre en place certains gestes barrières

Alors, elle a essayé de mettre en place de nouveaux gestes : "En reprenant le travail, j'avais quand même décidé d'éviter certaines pratiques. Je ne voulais plus embrasser sur la bouche, mais en fait c'était super difficile, les gens viennent pour une prestation avec du contact physique où on est censé un peu se détendre et ne pas être sur ses gardes à faire attention à la distance", raconte Mylène. 

Fanny a 27 ans et ça fait huit ans qu'elle est escort. Elle aime son métier parce que "j'aime les contacts avec les gens, je me sens utile et puis bien sûr, l'argent rapide". En parallèle du travail du sexe, elle travaille dans la restauration à Besançon. Seulement voilà, confinement oblige, elle a été placée au chômage partiel et ses revenus ont significativement diminué. Malgré tout, pendant le premier confinement, comme Mylène, elle n'a pas vu de clients. 

Il y a une forte demande, les clients sont très seuls, ils font aussi appel à nous pour être pris en considération"

Mais parce qu'il fallait bien payer son loyer et qu'elle aime ça "j'avais beaucoup de temps aussi, ça m'occupait", elle a travaillé via caméra. "J'ai fait plus de cam que d'habitude mais ça me manquait de travailler", explique Fanny. 

Au second confinement, elle a repris, en essayant d'appliquer des gestes barrières impossible à respecter dans son métier. "Je ne fais plus de missionnaire et je privilégie une position comme la levrette, pour éviter d'être face à face et qu'on se respire dessus, qu'il y ait des postillons", détaille-elle. 

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Mais pour autant, elle n'imagine pas arrêter de travailler car "il y a vraiment une forte demande de lien, d'attention, il y a beaucoup de solitude chez certains clients parce qu'ils sont toute la journée seuls chez eux et ils avaient vraiment besoin de nous pour être cajolés et pris en considération, pas pour être derrière un masque". Pour Fanny, l'escorting s'apparente aux métiers du soin

Pour mieux connaître l'association et lui faire des dons, PDA organise des portes ouvertes dans son local, 12 rue des frères-mercier, le 10 janvier 2021.

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