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ENTRETIEN - Le Vendée Globe 2020, "un ascenseur émotionnel" pour Servane Escoffier, l'épouse de Louis Burton

Elle est une témoin privilégiée de ce Vendée Globe 2020. Servane Escoffier est l'épouse de Louis Burton, en lice pour la victoire finale, et la cousine de Kevin Escoffier, dont le sauvetage par Jean Le Cam a ému le pays début décembre. Elle raconte son Vendée Globe, depuis la terre ferme.

Servane Escoffier à Saint-Malo, avant le départ de la Route du Rhum 2010 Servane Escoffier à Saint-Malo, avant le départ de la Route du Rhum 2010
Servane Escoffier à Saint-Malo, avant le départ de la Route du Rhum 2010 © Maxppp - David Ademas/PHOTOPQR/OUESTFRANCE TEAMSHOOT

Alors que le Vendée Globe doit connaître son dénouement ce mercredi, les proches des skippers sont en route vers les Sables d'Olonne. C'est le cas de Servane Escoffier, l'épouse de Louis Burton (Bureau Vallée), mère de leurs deux enfants et responsable de leur écurie "Be Racing". La navigatrice est également la cousine de Kevin Escoffier, le skipper de PRB secouru par Jean Le Cam après avoir passé de longues heures en mer dans son radeau de survie. Entretien.

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France Bleu Armorique : Dans quel état émotionnel êtes-vous à quelques heures, quelques jours de l'arrivée de Louis ?

Servane Escoffier : On est sur la route pour les Sables d'Olonne avec une partie de l'équipe et l'un de mes deux enfants. On a le zodiac derrière nous, on est heureux de faire cette route, on va vers l'arrivée, c'est très joyeux ! Il y a des bonnes ondes, on est contents, après on sait qu'en voile, en 36 heures il peut se passer énormément de choses donc il faut toujours garder la tête froide. Mais on essaie quand même de savourer ces moments là.

France Bleu Armorique : Quel est le programme pour vous, pour l'équipe, en attendant le retour de Louis ?

Servane Escoffier : On doit avoir une réunion avec la direction de course pour le protocole d'arrivée, car dans le contexte sanitaire actuel il faut essayer de cadrer au mieux les choses. Ensuite on va réceptionner plusieurs semi-rigides, déterminer qui pourra être à bord, sur le ponton ou pas pour l'arrivée parce que c'est très restreint... On continue à suivre la cartographie et évidemment on est toujours à l'écoute de Louis et de son Bureau Vallée.

FBA : Vous rafraîchissez la cartographie en permanence ?

Servane Escoffier : On rafraîchit toutes les demi-heures même si on sait que c'est actualisé toutes les trois ou quatre heures ! Ca devient un peu frénétique ! (rires)

FBA : Cette arrivée sans public, après un tel Vendée Globe pour Louis et les autres skippers, ça vous désole ?

Servane Escoffier : Je suis un peu partagée, dans le contexte actuel on est obligés de prendre en compte ce qui se passe. Même si pour nous c'est le grand événement de ces quatre années, même si les skippers ont passé trois mois dans des conditions difficiles, avec une édition très dure cette année. C'est vrai que le Vendée Globe c'est la course du public, c'est une course magique pour ça, parce qu'il y a toujours énormément de monde au départ, à l'arrivée... Là-dessus on est déçus, pour le public, pour tous les skippers et pour tous les gens qui travaillent de près ou de loin sur ces projets. Mais on est bien obligés de suivre les recommandations sanitaires, donc on est partagés. 

France Bleu Armorique : Si l'on cherche du positif, vous retrouverez peut-être Louis plus vite, plus facilement dans ces conditions ?

Servane Escoffier : Ce n'est même pas sûr parce qu'il y a toujours beaucoup de choses à faire pour un skipper à l'arrivée d'un Vendée Globe, surtout celui-ci qui est fou sportivement ! Je pense qu'il aurait préféré avoir du monde pour l'arrivée...

France Bleu Armorique : Le 21 décembre, Louis réussissait une réparation très compliquée en haut de son mât, au large de l'île Macquarie, et avait pris du retard sur la tête de course. Est-ce qu'il y avait alors encore de l'espoir pour un Top 3?

Servane Escoffier : A ce moment-là c'était vraiment passé au second plan parce qu'il était à plus de 1800 kilomètres de la tête de flotte. On pensait surtout à ce qu'il puisse, malgré ses nombreux et sérieux soucis techniques, finir sa course, ce qui était déjà une grande victoire. Et on a vu sa folle chevauchée fantastique. On s'est dit : "il est capable de remonter dans les 10, puis dans les 7, puis dans les 5..." jusqu'à ce qu'il passe en tête, une place qu'il a laissée à Charlie Dalin ce lundi matin... Mais après Macquarie, on souhaitait vraiment juste qu'il puisse finir.

France Bleu Armorique : Vous qui le connaissez mieux que personne, est-ce qu'il vous impressionne encore ?

Servane Escoffier : Oui, tous les jours il m'impressionne ! Par sa volonté, sa détermination à aller au bout des choses, sa résilience... On peut même parler d'abnégation, parce qu'à Macquarie il monte trois fois dans le mât, alors que c'est vraiment la chose qu'il aime le moins en mer. Il a réparé les pilotes, trouvé des solutions même quand il n'avait pas le matériel nécessaire à bord... Je n'oublie pas le soutien des équipes à terre qui l'ont aidé pour trouver des solutions, en travaillant des plans très techniques, vraiment c'est magnifique.  

France Bleu Armorique : Louis ne faisait pas partie des favoris, c'est une belle récompense aussi pour votre structure Be Racing ?

Servane Escoffier : Oui, on est très contents parce que ça fait quatre ans maintenant qu'on préparait ce Vendée Globe là, avec des hauts et des bas. Aujourd'hui c'est une belle récompense pour tous les gens qui se sont donnés à tous les niveaux. Certes on était pas le plus gros budget, loin de là sur cette édition, mais avec Louis on part toujours du principe qu'on pouvait avoir plus, avoir mieux, mais qu'il fallait apprendre à jouer avec le jeu de cartes qu'on avait en main. Louis est quelqu'un qui ne se plaint pas, qui ne la ramène pas, et qui se dit qu'on peut toujours faire de belles choses. Il faut aussi un peu de réussite, parce que tout aurait pu s'arrêter à Macquarie, mais nous sommes très contents de la course de Louis.

FBA : Comment avez-vous vécu, en tant que responsable d'écurie, compagne, mère et cousine (de Kevin Escoffier, NDLR) ce Vendée Globe ?

Servane Escoffier : C'était un ascenseur émotionnel ! Il y a eu de très bons moments, des moments plus difficiles, de stress, de doute... Quand  Kevin était introuvable, on était vraiment mal... Quand il a été sauvé par Jean (Le Cam, NDLR), c'était juste une explosion de bonheur. Concernant Louis, sportivement, il nous fait un truc incroyable ! Techniquement aussi, et humainement il est toujours heureux d'être en mer. Sur la gestion à terre, j'ai essayé autant que possible de préserver nos deux enfants qui ont neuf et sept ans. Ils vivent tout ça très bien, eux aussi ils sont complètement accros à la cartographie (rires) ! Bien sûr qu'il y a des moments où l'on était remplis de stress, mais ça fait des belles vibrations tout ça, on a une vie sympa ! 

FBA : Et vous Servane, quand est-ce qu'on vous revoit en compétition ?

Servane Escoffier : Il ne faut jamais dire jamais... Mais ces machines, ces IMOCA, ce sont vraiment des bateaux dingues... Je suis très admirative des femmes qui naviguent sur des Imoca à foils. Physiquement, ce sont vraiment des usines à gaz. Après on ne sait jamais, peut-être sur un plus petit bateau ? Je suis pas mal occupée avec mes différentes casquettes, mais je vous rassure je continue à naviguer, c'est juste que je ne navigue pas en course pour le moment.

FBA : Vous avez déjà planifié le retour à Saint-Malo ?

Servane Escoffier : Oui, on en a parlé, on va faire en sorte qu'il y ait une belle arrivée à Saint-Malo, avec les Malouins et les gens qui le souhaitent. Malheureusement, on ne pourra pas contenter tout le monde cette arrivée-là, mais on espère que le contexte sera un peu meilleur et qu'on pourra ramener le bateau dans ses terres malouines de manière grandiose.  

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